Selon un arrêt du 28 février, le simple refus pour un gérant de communiquer sur place des pièces à son commissaire aux comptes suffit pour caractériser le délit.
Qu'est-ce que cela signifie d'entraver les fonctions du commissaire aux comptes ?
Tout d’abord, l’entrave à l’exercice des fonctions du commissaire aux comptes (CAC) est un délit défini par le code de commerce. Cela consiste à empêcher les vérifications ou les contrôles effectués par les commissaires aux comptes ou à leur refuser l’accès aux documents nécessaires à leur mission, comme les contrats, livres, documents comptables et registres de procès-verbaux. Cette obstruction peut être le fait des dirigeants d’une entité ayant un CAC, ou de toute autre personne ou entité travaillant pour cette entité. Initialement régi par l’ancien article L. 820-4 2° du code de commerce, ce délit est maintenant couvert par l’article L. 821-6 3° depuis le 1er janvier 2024.
Par exemple
Dans une affaire soumise à la Cour de cassation
Dans un arrêt du 28 février 2024, la Cour de cassation précise les contours du délit d’entrave à la mission des commissaires aux comptes. Elle affirme que le simple refus de communication de documents peut suffire à caractériser l’infraction.
Dans le cadre de sa mission, un CAC sollicite l’accès à des documents auprès d’une société du secteur du bâtiment. Le 14 février 2019, lors de sa visite, la comptable est absente et le personnel refuse de lui remettre les documents demandés, sur instruction du gérant, qui souhaite être l’interlocuteur principal. Ce dernier, absent ce jour-là, transmet les documents le lendemain, arguant que ce retard prouve l’absence d’intention d’entrave. Le gérant est donc poursuivi pour délit d’entrave à la mission du CAC, ainsi que pour d’autres infractions, et fait appel de la décision de première instance.
La Cour d’appel soutient que le refus de communication, même temporaire, est suffisant pour caractériser le délit d’entrave, indépendamment de l’intention du gérant. Ainsi, la Cour d’appel confirme la culpabilité du gérant, estimant que le refus temporaire de fournir les documents constitue une entrave à la mission du commissaire aux comptes, sans qu’il soit nécessaire de prouver une intention d’entrave. Le gérant se pourvoit en cassation. Le demandeur, au pourvoi, soutient que l’entrave nécessite une intention consciente et volontaire, et que la transmission des documents le lendemain démontre son absence de volonté d’entraver.
La question posée à la haute juridiction, est de savoir si l’intention d’entrave est nécessaire pour caractériser le délit d’entrave à la mission d’un commissaire aux comptes.
En conclusion
En définitive, la Cour de cassation affirme que la transmission des documents le lendemain, ne compense pas l’inefficacité d’un refus immédiat. Elle conclut, donc, qu’un refus temporaire de communication est suffisant pour caractériser le délit d’entrave, en insistant sur le fait que le gérant a volontairement refusé de communiquer les pièces nécessaires à l’exercice de la mission du commissaire aux comptes. Par conséquent, la Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme l’arrêt de la cour d’appel, assurant qu’un refus temporaire de communication peut constituer une entrave, indépendamment de l’intention.
Cet arrêt renforce l’exigence de coopération immédiate des entreprises envers les commissaires aux comptes, établissant que même un refus temporaire peut suffire à caractériser le délit d’entrave. La décision souligne l’importance de la transparence dans les relations entre les entreprises et les organes de contrôle financier.
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